En fait, ça commence un peu avant la ruche.
il y a 15 milliards d'années : le BIG BANG...
Un peu plus tard, une abeille butine. Elle a beau se cacher : ses pattes et ses pelottes de pollen la trahissent...
Je vous retranscrit un bout de "Ces pollens qui nous soignent", de Patrice Percie du Sert (chapitre 2) :
"En 1960, Pain et Maugenet découvrir une fascinante pratique chez les abeilles. Elles butinent le jus sucré sécrété par les glandes nectarifères des fleurs. Ce nectar, qui contient de 50 à 70 % d'eau, va être concentré dans la ruche pour fabriquer le miel. Avec 15 % d'humidité, le miel peut se conserver dans la ruche d'une année sur l'autre. C'est la réserve en nourriture énergétique des abeilles. Sur leurs pattes, les abeilles transportent le pollen aggloméré en petites boules appelées pelotes. Ce sont les cellules fécondantes des fleurs.
Les abeilles maîtrisent à la perfection la fabrication de petits "fromages" de pollen lacto-fermentés dans les alvéoles qui entourent le nid à couvain : c'est le "pain d'abeilles". Performance extraordinaire, elles conservent un aliment plus riche en protéines que la viande ou le poisson. Le pollen, par cette richesse en protéines, est extrêmement fragile car les micro-organismes qui pourraient le corrompre abondent. L'abeille réalise cette performance à 36°C, température idéale pour le développement de nombreuses bactéries. C'est cependant la température du pourtour du lieu d'élevage des larves. Il y règne de plus une humidité extrêmement élevée, pour que ni les larves, ni la gelée royale ne se dessèchent. Pain et Maugenet ont découvert le procédé utilisé par l'abeille pour une parfaite conservation du pollen : les abeilles élèvent, dans le nectar qu'elles emmagasinent autour du nid à couvain, des ferments lactiques et quelques levures.
Avant de partir pour butiner, les abeilles emplissent leur jabot de nectar prélevé dans la ruche. Pendant le butinage, elles régurgitent ce nectar goutte à goutte pour mouiller leurs pattes postérieures. Le pollen va s'agglutiner autour d'un poil situé au centre des "corbeilles" de leurs pattes postérieures.
Vous avez sûrement observé les abeilles pratiquant un vol stationnaire, tels de petits hélicoptères, après le butinage. C'est lors de cette phase du vol qu'elles régurgitent des gouttelettes de nectar qu'elles passent de patte en patte pour humidifier les pelotes portées par les pattes postérieures. Le pollen, qui n'adhère que faiblement aux poils du corps, est projeté sur les pelotes par le courant d'air que le battement des ailes génère. La vibration du corps pendant le vol va compacter le pollen dans les corbeilles. Lors de ces opérations, un ensemencement en bactéries est pratiqué par l'abeille. Les ferments qui sont dans le nectar vont donc ensemencer les pelotes. Cette pratique, digne de l'industrie alimentaire, est en fait maîtrisée par l'abeille depuis plusieurs millions d'année."
Voilà, ça valait bien un bon quart d'heure de retranscription, non ?!!
De retour à la ruche, l'abeille va être confrontée à un stratagème appelé "trappe à pollen", destiné à lui retirer une partie de sa précieuse récolte. Le tunnel d'entrée à la ruche, visible sur la droite, est barrée d'une grille dont les trous font la taille du corps de l'abeille (4,9 mm pour être précis). La grille dépasse sur la gauche : on voit bien la cause de l'arnaque... L'abeille passe la grille, mais pas les pelotes qui dépassent sur le côté des pattes : elles sont décrochées et tombent dans un panier hors d'accès des butineuses. Au bout de 2-3 jours, ces mini-Einstein passent une patte puis l'autre, rentrant ainsi 80 à 85 % du butin protéiné pour élever leurs larves malgré tout. Autant dire qu'on ne pratique cette récolte que sur les colonies fortes et récoltant plus de pollen que les autres...
A l'arrière de la grille, on aperçoit le "trou à mâles", qui permet aux faux-bourdons d'aller faire pipi malgré leur stature barrée par la grille, et aussi à un paquet de butineuses de courcircuiter la grille. On ne peut pas leur en vouloir...
Dans le panier, le pollen s'accumule sous le regard désabusé des butineuses.
Je vide les paniers l'après-midi, pour éviter que l'humidité nocturne n'altère le précieux butin. Les paniers se retirent sur l'autre côté et sont vidés. Je les nettoient à la brosse à dent pour que le pollen un peu collant ne puisse moisir d'un jour sur l'autre, et je les javellise une fois par semaine.
Le pollen est ensuite pesé pour le suivi de la production ruche par ruche.
Lors de la remise du panier, comme l'utilisation de la fumée est proscrite pour respecter le pollen, il est sage de chasser les abeilles (avec le manche de la brosse à dent par exemple) pour éviter un carnage... C'est l'occasion aussi d'enlever d'éventuelles larves de fausse-teigne, ce papillon gourmand de cire et de pollen, qui a trouvé la planque à l'abri des nettoyeuses.
Il est temps de rentrer dans le local de conditionnement !
Le pollen "brut de récolte" nécessite un tri soigneux . Voyez plutôt ! A gauche, on aperçoit une fourmi et un morceau de tégument. A droite, c'est une fleur qui s'est égarée dans le quartier...
On aperçoit souvent des petites boules irrégulières : c'est de la propolis en cadeau bonus ! A droite, la butineuse qui nous honore de cette nette amélioration du menu... Les corbeilles à pollen servent aussi à ramener la précieuse résine.
Je passe le pollen dans un trieur simple, dont le plan se trouve à cette adresse.
Le ventilateur d'ordi, judicieusement recyclé, crée un courant d'air ascendant. Le pollen, assez lourd, est peu dévié, contrairement à la poussière de pollen et autres petits débris légers.
Comparez ce qu'on trouve dans les tiroirs en bas :
pollen à gauche essentiellement, à droite, le reste !
Ce procédé malin n'empêche pas un contrôle visuel, pour enlever les quelques fourmis qui se sont accrochées au grain de pollen dans leur chute vertigineuse, ou encore une larve d'abeille mycosée, montrant que sa ruche commence à être en manque de pollen (je lui retire alors la grille).
Le pollen trié est ensuite pesé et mis en sachet.
J'utilise un compresseur de frigo (merci Bernard, qui se reconnaîtra !) branché sur un appareillage maison pour faire le vide : voyez plutôt !
ça
marche
!
Ensuite, il est temps de sceller la poche pour dire adieu à l'oxygène pour un bon bout de temps...
J'imprime une page d'étiquettes en recto-verso, sur du papier épais, pour informer les futurs gourmands.
Une dernière soudure pour immortaliser l'instant...
Il est grand temps de mettre le fruit de ce travail "au chaud", enfin à l'abri, à -18°C !!!
(il va être temps de dégivrer le "qu'on gèle", d'ailleurs !)
(et il va être temps d'aller se coucher, aussi !!
Bonne nuit les zamis !!!)